Déroulement d’une partie de contrée typique
Distribution
Nous désignerons les joueurs par les points cardinaux : les deux équipes sont donc N-S et E-O. Admettons que S coupe, alors E distribue et N sera le premier à parler et à jouer.
La distribution donne par exemple :
Enchères
On peut imaginer que les enchères se dérouleraient ainsi :
- N : N a 3 piques dont le valet, plus un As troisième à cœur et une coupe franche (ie aucune carte) ! à carreau… Il annonce donc sans trop hésiter un 80 pique, ce qui revient à demander à S s'il a le 9 de pique…
- O : O a 3 carreaux dont V et 9 ; il a en plus en As à trèfle. Il annonce alors sans hésiter un 90 carreaux.
- S : S a une mauvais jeu en soi (il possède deux V, mais il a très peu de jeu d’accompagnement). Mais l’annonce de N le satisfait pleinement puisqu'il a le 9 second à pique. Il répond donc plein d’assurance 100 pique !
- E : E a un bon jeu pour accompagner une prise (2 As, un dix second !). Il n’a en revanche rien pour lancer une nouvelle couleur (il lui faudrait d’ailleurs lancer à 110, ce qui est rarement facile !). L’annonce de O l’a hautement réjoui, puisqu'il a 3 cartes a la couleur demandée (carreau). Il répond sans hésiter 110 carreau.
- N : N est embêté ; il a bien compris que S a le 9 de pique, mais s'interroge sur la possiblité de réaliser un 120 avec son jeu… Il se dit finalement qu'on n’a rien sans rien, et décide d’annoncer 120 pique… E se mord les doigts et de dit qu'il aurait quand même pu annoncer directement 120 carreau, ce qui aurait certainement dissuader N de parler. Maintenant O va devoir décider !
- O : O est de type impulsif : si E est monté, c'est qu'il doit avoir soit pas mal d’atouts, soit des as… En tous les cas, il est intéressé et annonce, sûr de lui 130 carreau.
- S : Les choses sont montées très haut, et S n’a pas de quoi suivre : il passe sans hésiter… N soupire de soulagement : il ne pourrait pas assumer un 140 !
- E : E est dans une situation pénible ; il a un as, qu'il aimerait bien annoncé, mais les enchères sont déjà très hautes, et a peur de chuter. Il décide donc de "petit-jouer" et de passer…
- N : N passe sans trop de regrets en voyant son jeu… Il peut espérer d’ailleurs pouvoir faire une bonne défense en utilisant son As à bon escient…
S, O, et N ont passé : les enchères sont donc finies ; l’atout choisi est donc carreau et l’équipe E-O doit faire 130 points.
Les tours de jeu
1er tour : N a la main
- N : N préfère ne pas jouer son As de cœur tout de suite ; il espère pouvoir faire une impasse intéressante avec lui… Il joue alors son V pique, puisque les deux cartes qui le suivent (10 et R) seront maîtresses si l’As tombe.
- O : O ne sait pas où va "aller" ce tour ; il jette sa D : soit l’As est chez E et c'est tout profit, soit il est chez S, et cela pourra peut-être éviter que S soit tenté de faire l’impasse…
- S : S n’a que des cartes sans valeur à pique ; il jette donc (formellement …) celle de plus bas rang, le 7
- E : E n’a pas le choix : il a un As sec, il le joue. Il remporte donc le pli.
2ème tour : E a la main
- E : E a de l’atout, il est dans l’équipe preneuse : il n’a moralement pas le choix, il doit lancer un tour d’atout pour faire tomber les atouts de l’adversaire. Ayant l’As troisième, il lance par exemple le 7 (il ne lance pas l’As qui pourrait s'avérer maître…).
- N : N n’a pas d’atout. Il peut se défausser de n’importe quelle carte : il jette une carte sans valeur, puisqu'a priori, le pli devrait être remporté par l’adversaire. Il pose donc le 7 de cœur
- O : O est maître à l’atout et le montre en posant, par exemple, le V de carreau : il est sûr de remporter le pli.
- S : S jette son atout de plus faible valeur, ie le R de carreau.
3ème tour : O a la main
- O : O se doit de continuer la quête de l’atout. Il joue donc son 9 qui est maître…
- S : S a un 10 sec à l’atout : il n’a donc pas le choix et le joue…
- E : E veut faire comprendre à O qu'il ne reste pas d’atout à S (ce qu'il a deviné en voyant que S a joué son 10 : il peut estimer que si S avait eu une carte plus faible, S l’aurait jouée ; par ailleurs, il sait que S n’a pas de cartes plus fortes… CQFD!). Il fait comprendre son raisonnement à O en jouant l’As.
- N : N n’a pas plus d’atout qu'au tour précédent et continue à jeter des cartes sans valeur ; la seule qui lui reste est le 9 de trèfle, qu'il pose donc…
4ème tour : O a toujours la main
- O : Le contrat que O doit jouer est élevé ; par ailleurs, E semble lui avoir donné un indice en posant son As. À moins de penser que S ait fait une feinte (ie posé son 10 alors qu'il avait une carte plus faible), il peut raisonnablement espérer que S n’a plus d’atout… Il ne va donc pas rejouer de l’atout. Il a un as à placer à trèfle. Cependant, sa seconde carte à trèfle est un Roi… Il va donc tenter l’impasse en espérant que ce n’est pas N qui a le 10 de trèfle. Il joue donc son roi de trèfle.
- S : S ne peut pas devenir maître, mais au cas où N aurait l’As, il sacrifie son V : 2! points ne coûtent pas grand chose, et peuvent parfois permettre de faire chuter un contrat…
- E : E n’a aucune raison de jouer son 10 : soit c'est O qui a fait l’impasse, auquel cas, il lui donnera le 10 au tour suivant ; ou bien, c'est N qui a l’as, et dans ce cas, jouer le 10 reviendrait à lui donner 10 points. Il joue donc le 8 de trèfle.
- N : N n’a plus qu'une carte à trèfle, la dame, qu'il joue donc.
5ème tour : Décidemment, O ne veut plus lâcher la main…
- O : O est ravi, son impasse a marché ! Il n’hésite donc pas à lancer son as de trèfle, pour finir de récolter les points…
- S : S n’a plus qu'une carte à trèfle, le 7, qu'il joue donc.
- E : E n’a plus qu'une carte à trèfle, le 10, qu'il joue donc. O est un peu déçu de voir que son impasse était en fait inutile…
- N : N jette sa carte de plus faible valeur, sa dame de cœur…
6ème tour : Ah, mais qu'il est collant ce O ; va-t-il laisser la main à un autre joueur, un jour ?
- O : O n’a plus aucune carte maîtresse ; rien ne lui indique que E en ait encore, puisqu'il a déjà posé un As à pique. Il décide de rejouer pique : en effet, O peut être quasiment sûr que soit E est maître à pique soit n’en a plus (auquel cas il pourra couper et remporter le pli) puisque E a pris la main au premier pli avec son As alors que O était déjà maître avec sa dame ! Il joue donc le 8 de pique.
- S : S n’a toujours pas le choix, et joue donc son 9 de pique.
- E : E n’a plus de pique, et son partenaire n’est pas maître : il est donc obligé de couper, donc de poser son 8 de carreau.
- N : Le pli étant coupé, N a tout intérêt à poser sa carte de plus faible valeur à pique, à savoir le R.
7ème tour : Cette fois, c'est E qui a la main.
- E : E n’a plus vraiment le choix… Il jette par exemple le 8 de cœur.
- N : N n’a pas le choix et joue son As de cœur.
- O : O n’a pas le choix et joue son R de cœur.
- S : S sait que c'est le seul pli que son équipe va faire (il a compté les atouts et sait donc qu'il en reste un dans le jeu.). Il fait donc une give points operation en posant son 10 pour assurer un maximum de points à son équipe…
8ème tour : La der
N a la main, mais O a encore un atout et ferme donc trivialement le jeu…
Le score
La défense n’a fait qu'un seul pli qui vaut : As + 10 + Roi +8 = 11 + 10 + 4 + 0 ! = 25 points. Pour faire chuter le contrat, elle devait faire au minimum 33 points, le contrat est donc réussi. La défense inscrit donc 30 points dans sa colonne (25 s'arrondit à 30), et l’attaque a donc points faits + points annoncés = (160-30)+130 = 260 points. On notera que l’attaque a en fait réalisé 162 - 25 = 137 points, ce qui s'arrondirait à 140 ; c'est uniquement par convention et par commodité qu'on calcule en retirant l’arrondi de la défense plutôt qu'en arrondissant le total de l’attaque…
Pour la manche suivante, ce serait E qui couperait pour N qui distribuerait, et donc O aurait la main…
Les images de jeu ont été produites en utilisant cardsML (voir les fichiers sources) et les cartes à jouer SVG.